Et si la comédie démocratique à laquelle nous assistons sur différents continents, dont notre chère bonne vieille Europe, n’était qu’une pâle mais malheureusement réelle copie des productions cinématographiques ? Petit précis laïque et démocratique du grand écran.
La démocratie fait son cinéma. La réalité dépasse la fiction. Ou plutôt la fiction d’hier anticipe et prépare les esprits à la réalité de demain. Et la démocratie là-dedans? Utopie hier. Réalité trouble aujourd’hui. Fiction demain ?
Ailleurs, les insulaires qui roulent à gauche rejettent le diktat des technocrates bruxellois. On leur avait vendu la paix. Les Britanniques rêvaient de prospérité. Ils affrontent chômage, précarité record et immigration non contrôlée. Attisée par la sournoise manipulation nationaliste des tabloïds, la sanction est sans appel. Perte de confiance dans le discours arrogant des eurocrates d’une commission européenne fantoche sous leadership berlinois. Bref, les Britanniques refusent de se faire refiler de la monnaie de singe. Brexit. La voix du peuple a parlé. Les supposés leaders politiques affichent leur incompétence à gérer la situation. Le cave se rebiffe.
Ailleurs, pour sauver le monde la recette est simple. Un. Prêter allégeance successivement à un Président afro-américain. Puis à une femme Présidente. Deux. Torturer tout ce qui bouge et tirer sur le reste. Trois. Sacrifier sa conscience et bafouer les lois pour mieux protéger le citoyen. 24H Chrono. Jack Bauer.
Ailleurs (encore), Hillary Clinton peine à caracoler en tête des sondages malgré un adversaire inculte, intolérant, inexpérimenté, misogyne, agressif et discourtois. Pourtant non dépourvue de qualités, et loin s’en faut, sauf peut-être en informatique, l’épouse de Bill traine comme un fardeau 30 ans de scandales financiers et de compromissions en tous genres. Alors, elle parle. Elle parle. Elle sourit. Elle tente de nous convaincre que troisième âge est synonyme de pleine forme et impunité de gage d’expérience. L’Amérique mérite pourtant un débat démocratique d’une autre tenue. Elle boit pas, elle fume pas, elle drague pas… mais elle cause.
La laïcité elle aussi, pilier d’une démocratie pérenne et si chère à nos cœurs, n’en finit plus de dériver.
Ailleurs et hier, n’oublions pas que, dans ses discours vengeurs, G.W. Bush junior invoquait son Dieu aussi souvent que Ben Laden se revendiquait du sien. Pour légitimer actions, comme exactions, Dieu est probablement une meilleure caution que les lobbys pétroliers des uns, ou les pulsions sanguinaires et dominatrices des autres. L’œuvre de Dieu, la part du Diable.
Le Vatican s’impose en médiateur dans la crise démocratique qui secoue le Venezuela. Le Pape vient de recevoir Nicolas Maduro. Pour plaider en faveur du référendum à venir. Pour l’enjoindre de respecter l’opposition et le choix des urnes. Pour glisser un petit mot en faveur des grands équilibres pétroliers ?… En termes marketing c’est plutôt bien vu. L’Amérique du sud sera bientôt l’ultime bastion continental du catholicisme de Rome. Anges et démons.
Dans la vraie vie, désormais, et plus que jamais depuis des siècles, pas un sujet politique ne s’examine sans recourir au kaléidoscope religieux. Catholicisme, protestantisme, judaïsme et islam ne guident plus nos consciences. Ils dictent ouvertement les choix politiques de nos démocraties.
Ici, ce n’est pas comme ailleurs…
Nous sommes coincés entre religions et déni de démocratie. Ailleurs, Donald Trump refuse de dire s’il reconnaitra sa défaite. Il fera quoi. Il s’installera en colocation à la Maison Blanche ? Ici, tout le monde s’en émeut. Viens chez moi, j’habite chez une copine.
Ailleurs, on ne compte plus les pays qui torturent, asservissent ou annoncent les résultats des élections la veille du scrutin. Ici, tout le monde s’en émeut. Hôtel Rwanda.
Ici, et hier, le 29 mai 2005, les Français rejettent largement par référendum le projet de traité constitutionnel européen. En 2007, une improbable coalition, Nicolas Sarkozy, Valéry Giscard d’Estaing et le parti socialiste en coulisse, fait ratifier par voie parlementaire le Traité de Lisbonne. Traité qui reprend à l’identique, ou presque, tous les termes et conséquences du projet initial pourtant rejeté par un peuple persuadé qu’il est encore souverain. Un déni de démocratie. Pour notre bien, je suppose. Les politiques savent. Les sans-dents ignorent. Personne ne s’en émeut. L’Arnaque.
Ici, aujourd’hui, les urnes affirment, et réaffirment, que le projet d’aéroport à Notre-Dame-des-Landes doit vivre. Peu importe qu’elles aient raison, ou pas. Les caciques de la République refusent toujours d’évacuer le site. Personne ne s’en émeut. Cause toujours… tu m’intéresses !
Ici, les urnes portent un parti réactionnaire et intolérant aux plus hautes responsabilités de la municipalité de Béziers. Peu importe qu’elles expriment la sagesse, ou pas. L’opposition refuse de se soumettre et perturbe des débats supposément démocratiques. Bagarre générale. Personne ne s’en émeut. Tout le monde détourne et déforme l’information pour servir ses intérêts. Dupont Lajoie.
Ici, un Président, normal, qui n’a pas de bol, dit tout ce qu’il ne devrait pas dire, ne représente plus que 4% de Français satisfaits. Et pourtant, il envisage de se représenter. La pauvreté du débat républicain fait que seuls ses adversaires s’en émeuvent. Et encore, pour de basses considérations de récupérations électorales. Je sais rien, mais je dirai tout.
Ici, les dénis de démocratie et l’emprise des religions constatés ailleurs provoquent des tollés d’indignation. Ici, les réunions politiques dans une mosquée, les femmes voilées dans des lieux publiques, les refus répétés, affirmés ou tacites, de se soumettre au verdict de urnes, les agressions contre la police, le non-respect de la justice n’indignent pas vraiment. Une certaine “élite” ne ménage pas ses efforts pour nous faire croire que cela ne traduit rien d’autre que la légitime manifestation de la liberté d’expression et de conscience du citoyen.
Ce refus d’ouvrir les yeux sur ces atteintes patentes à la démocratie, ou à la laïcité, ou les deux à la fois, n’est pas que malsain. Il fragilise gravement notre République.
Il faut sauver le soldat Ryan.
Ryan au féminin. Ryan c’est la démocratie laïque en danger. Elle a déjà perdu ses trois sœurs. La première s’appelait cohabitation harmonieuse entre communautés. La deuxième, civilité, civisme et respect d’autrui. La troisième, éducation, langue française et subjonctif… La plage est minée. Les falaises démesurément hautes. Avant nous, d’autres vainquirent l’adversité. A notre tour de relever le gant. De débarquer. D’escalader. Par les urnes. Pas devant la télévision ou un écran de cinéma. Ou pire, un écran de fumée…
Dominique Bamas – Président d’Upsides Dirigeant Conseil, expert-comptable, commissaire aux comptes et médiateur