L’AMF et le haut comité de gouvernance font pression pour que les entreprises mesurent la contribution individuelle de chaque administrateur.
Evaluer le fonctionnement collectif d’un conseil d’administration ne serait pas suffisant. Il faudrait pouvoir mesurer la contribution individuelle de chaque administrateur. Voilà ce que veulent les autorités de régulation. L’Autorité des marchés financiers (AMF), le gendarme des marchés financiers, comme le haut comité de gouvernement d’entreprise (HCGE), garant du code de bonne conduite Afep-Medef, plaident pour que les grandes entreprises mettent en place un tel dispositif. Et ce tout spécialement lorsque des renouvellements de mandats d’administrateur sont soumis au vote des assemblées générales d’actionnaires. Cela permettrait de jauger ce que certains membres du conseil apportent par rapport à d’autres.
Dans son rapport d’activité 2014, le HCGE relevait déjà que « l’analyse de la contribution des membres était indispensable aux travaux de préparation du renouvellement des mandats par le comité des nominations ». Et d’ajouter : « En pratique, il n’y a pas de raison qu’elle nuise au bon esprit du conseil, puisque ses résultats sont naturellement destinés à rester confidentiels, les actionnaires n’ont besoin que de savoir qu’elle a bien eu lieu. » Jusqu’alors, le code Afep-Medef recommandait une évaluation du conseil par un cabinet externe tous les trois ans et une évaluation en interne (par l’administrateur référent ou le président du comité de nomination ou encore par le secrétaire général du conseil), tous les ans.
« Eviter la langue de bois »
Si cette pratique est devenue monnaie courante (70 % des groupes du CAC 40 respectent désormais, contre 12,5 % il y a cinq ans), mesurer la performance de chacun, au vu des susceptibilités à préserver, semble relever de la mission impossible. Le risque est grand que les administrateurs se musellent de peur que leurs propos ne soient répétés. « Pour évaluer la contribution des administrateurs, il faut éviter la langue de bois. Il faut que l’administrateur puisse tirer de cet exercice une réelle valeur ajoutée pour lui. Nous avons interrogé individuellement chaque administrateur sur l’engagement, la nature de la contribution et la valeur ajoutée de chacun de ses collègues. Ensuite, nous avons consolidé l’ensemble des résultats que nous avons présentés à l’administrateur référent, qui donne ensuite à chacun de ses collègues un retour individuel dont personne d’autre n’a connaissance », explique Bertrand Richard.
Cette année, Spencer Stuart a procédé à six missions d’évaluation des contributions individuelles des membres des conseils. « L’idée n’est pas de faire passer un examen, mais de voir si les contributions sont adéquates. Dans 80 % des cas, il n’y a aucun souci. mais dans les 20 % restants, cette évaluation permet de mettre le sujet de discorde sur la table, de dialoguer, de procéder aux ajustements nécessaires, puis de régler les problèmes. » Ce n’est pas son seul effet bénéfique. « Bien souvent, les administrateurs sont frustrés, car ils ne savent pas si leur travail correspond aux attentes du conseil. Dès lors que l’administrateur référent leur restitue les conclusions de l’évaluation, ils savent où se situer.
Par Laurence BOISSEAU, le 18 septembre 2016.
Source : leschos.fr